Le jeûne la prière et le partage sont les trois piliers du carême et sont indissociables. Ils nous parlent de notre retrait du monde, et en particulier du monde de la consommation dans lequel nous baignons habituellement, de notre retour vers l’intériorité, mais aussi de notre ouverture à l’autre dans la fraternité.
Les articles sont réparties selon ces trois thématiques:
par Jean-Claude Noyé
Texte et bibliographie extraits du « Grand livre du jeûne » (Ed. Albin Michel) de Jean-Claude Noyé, avec l’aimable autorisation de l’auteur
Nous avons croisé des jeûneurs chevronnés engagés activement dans la sauvegarde de la planète. A commencer par Gandhi, écologiste avant l’heure, très critique face à la société industrielle. Son slogan « Vivre simplement pour que simplement tout le monde puisse vivre » a fait florès. Notamment auprès des militants de la simplicité volontaire et de la décroissance, représentés en France par le mensuel Silence et le bimestriel La Décroissance. Bien que très minoritaires, ces militants, et les théoriciens qui les soutiennent, comme l’économiste Serge Latouche, se sont invités dans le débat politique et posent une vraie question : « Peut-on avoir une croissance illimitée sur une planète aux ressources limitées ? » Ils font valoir, non sans raison, que les termes « développement » et « durable » sont antinomiques car le développement économique entraîne nécessairement un surcroît de consommation d’énergie et donc, de pollution. Une charge supplémentaire pour la planète qui n’en peut déjà plus. Lire la suite →
par Laura Morosini
(texte paru dans le cahier spirituel du Pèlerin en mars 2013)
Lors du carême l’occasion nous est donnée d’expérimenter un temps de privation, de jeûne volontaire. La prescription traditionnelle d’absence de viande les vendredi nous permet d’interroger notre consommation. Nos choix ou nos automatismes d’achat ne sont pas sans conséquences sur le monde alentour. Aussi il est utile de vivre dans notre chair, durant un temps donné, ce que d’autres (un milliard de personnes) vivent au quotidien et d’ainsi se rendre compte de l’opulence alimentaire dans laquelle baigne notre société. Ici, à tout moment, tout est disponible sans tenir compte de saison ou de distance.
Mais qui est cet autre ? Il peut être, par exemple l’indien amazonien dont l’habitat et les moyens de s’alimenter ont été détruits par la culture de soja destinés aux tourteaux hyperprotéinés des pays riches. Ainsi le prochain peut être…lointain mais porté par notre pensée, notre prière et notre action solidaire de carême.
« Dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits d’entre mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » Mat 25, 40
par Priscille de Poncins
(texte paru dans le cahier spirituel du Pèlerin en mars 2013)
Le jeûne est connu depuis l’Antiquité pour des raisons médicales ou spirituelles. Cette pratique héritée de la religion juive prend place lors du Carême, quarante jours avant Pâques chez les chrétiens. A la suggestion du diable d’user de son pouvoir pour changer les pierres en pain, Jésus répond : « Il est écrit : Ce n’est pas de pain seul que vivra l’homme. » (Mt.4, 4 et Luc 4, 4). Pour se convertir individuellement et collectivement , il est proposé de diminuer sa nourriture, de manger du poisson les vendredis en se détachant des choses terrestres. Le jeûne des orthodoxes dure un tiers de l’année liturgique. Le jeûne du Carême chrétien n’est pas simple obéissance à une loi « promulguée par Dieu dans sa sagesse » comme pendant le Ramadan. Il est un temps de marche vers la Résurrection de Jésus.
« Quand vous jeûnez, ne vous donnez pas un air sombre comme font les hypocrites. […]Pour toi, quand tu jeûnes, parfume ta tête et lave ton visage pour que ton jeûne soit connu, non des hommes, mais de ton Père qui est là, dans le secret ; et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » Mt 6, 16
En novembre 2013, la 19ème Conférence des parties à la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique s’est tenue à Varsovie. Les délégués des différentes religions présents sur place ont alors lancé un jeûne interreligieux pour la justice climatique, tous les 1ers du mois au moins jusqu’à la conférence de Lima en décembre 2014. en savoir plus
de Michel Maxime Egger,
auteur de La Terre comme soi-même; repères pour une écospiritualité ,
Ed. Labor et Fides, 2012
Trinité sainte, Père, Fils et Esprit,
Mystère au-delà de tout nom et de toute pensée,
Trésor des grâces du Ciel et de la Terre,
Toi qui es partout présente et qui emplis tout,
Viens et demeure en nous.
Par ton commandement à nos ancêtres Adam et Éve,
Tu nous as montré que manger est plus que nous nourrir.
En instaurant un décalage entre leur désir et son assouvissement,
Tu as fixé une limite à notre avidité. Lire la suite →
par Père Dominique Lang, prètre assomptionniste,
créateur du Blog Eglise et Ecologie, et initiateur des Cahiers de St-Lambert.
Esprit Créateur, toi qui,
depuis le commencement du monde,
tiens ce monde dans le cœur de Dieu,
viens à notre aide
alors que nous entrons dans ce temps du désert.
Quarante jours durant,
nous voilà confrontés à nous-mêmes.
A ce qui hurle en nous et à ce qui à peur.
A ce qui nous ment et à ce qui nous tente.
Mais aussi à ce qui a faim et soif
A ce qui pleure et demande
A ce qui attend et espère
A ce qui crois et à ce qui sait. Lire la suite →
par Gilbert Landais.
Quoi de plus naturel que de faire le lien entre le Carême et la sauvegarde de la planète ! En effet, la sobriété et le partage rejoignent très précisément les défis écologiques. Plutôt que de continuer à dilapider les ressources de la planète, comme nous le faisons maintenant, il nous faut apprendre à nous contenter de notre “juste part”. C’est vrai pour l’alimentation, notamment en modérant notre consommation de viande qui, au fil des années, est devenue excessive (voir pages “Pourquoi”), ou encore en choisissant des produits locaux et de saison. Mais, comme nous le verrons plus loin, la sobriété concerne également d’autres domaines comme les transports, le logement et l’achat de divers biens de consommations.
Quant au partage, il s’agit d’un enjeu écologique majeur. Car, s’il est vrai que l’empreinte écologique de l’humanité est globalement très excessive, on observe une grande disparité des situations. En effet, pour soutenir le mode de vie d’un américain, il faudrait 5 planètes alors que, pour celui d’un indien, il en suffit de 0,4. C’est donc dans un esprit de solidarité que nous, habitants de pays dits développés, devons nous efforcer de réduire notre consommation de ressources naturelles. Ainsi, nous œuvrerons à la préservation des conditions de vie des habitants des régions pauvres de la planète et des générations futures. Lire la suite →
par Christine Kristof-Lardet
(texte publié dans le cahier spirituel du Pèlerin en mars 2013)
Partager son pain est une chance de rendre grâce et de restituer à la vie une parcelle de ce dont elle nous abreuve avec une infinie générosité en permanence.
Partager son pain, c’est ouvrir l’espace de son cœur à l’autre que je ne suis pas, tout s’inscrivant dans une fraternité et une solidarité qui nous conduisent à sortir de nos égoïsmes ; partager son pain, c’est inviter l’autre à sa table et compter avec lui en lui donnant la meilleure place.
Partager son pain, c’est être sobre volontairement, c’est dire « non-merci » à la seconde part de tarte, mais aussi plus globalement c’est apprendre à limiter nos besoins pour pouvoir entendre celui des autres, accepter de manger moins pour que d’autres puissent simplement manger. C’est cultiver une attitude de tempérance, de modestie, de simplicité, d’humilité… de pauvreté volontaire qui nous amène à entrer en communion avec nos frères en humanité, et par là même avec le Christ. « ce que vous avez fait au plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » Mat 25/40. Le jeûne encourage la « juste mesure » et rend la pomme plus savoureuse et plus précieuse.
Partager son pain ne veut pas dire garder une moitié pour soi, mais plutôt donner l’autre moitié et plus encore… c’est pouvoir tout donner, sans rien garder, comme nous y appelle le Christ quand il nous demande de le suivre.
C’est à proprement parler, entrer en communion avec les autres êtres humains, mais aussi avec toute la création –la terre, la pluie, le vent, les semences, le feu, les animaux … qui ont permis au pain de se faire.
Le partage du pain est évidemment l’eucharistie –communion dans et avec le corps du Christ, et dans ce sens avec la création toute entière qu’il récapitule.
Partager son pain peut vouloir dire « manger moins de viande » comme nous le proposent les Chrétiens Unis pour la Terre, durant ce temps de carême, pour vivre un temps de paix et de solidarité avec la création tout entière.
par Damien Gangloff
(texte publié dans le cahier spirituel du Pèlerin en mars 2013)
Rejeter Celui qui nous laisse dans le manque ou nous recentrer sur l’Essentiel pour survivre ! La faim, ce manque, nous place comme Job face à notre confiance en Dieu. Arme de guerre (Judith 7, 14) ou punition de Dieu (Isaïe 65, 13) dans la bible, la faim n’est pas bonne en soi ; mais appropriée, elle devient un révélateur. Or non seulement Dieu comble physiquement celui qui se tourne vers Lui ( Isaïe 49, 10 ; Mathieu 6, 26) mais la relation même à notre Créateur s’avère essentielle – l’Homme ne se nourrit pas seulement de pain (Mathieu 4, 4).
La faim nous fait aussi goûter à la détresse du souffrant et nous offre ainsi une possibilité de partage, c’est-à-dire un accès au service de la justice – et heureux sont-ils les affamés de justice ( Mathieu 5, 6) ! Folie de la foi qui fait des ténèbres l’occasion de distinguer Sa Présence diaphane qui contraste avec l’abandon aux sirènes du monde qui n’y croit plus (Jean 1, 10) ! Profitons du jeûne pour nous exercer à ce combat bien réel (Saint Paul Romains 8, 35) !
